16 juin 2012

Quand j’allais chez mon psy à Bordeaux, parce que ma mère s’était suicidée et que je ne tenais pas le coup, je lisais deux devantures. L’institut de beauté Soleil noir me rappelait le livre éponyme de Julia Kristeva sur les malaises féminins entre autres Dostoievsky. Dépôt vente enfants finissait sur l’avenue. Dans les dernières séances je parlais de mon grand-père et de son séjour dans un camp de concentration du nord de l’Allemagne et de l’asphyxie de sa fille assommée par une prise de médicaments dans l’habitacle de la voiture. J’allais avoir vingt-six ans et elle cinquante-deux lorsqu’elle accomplit, munie d’un tuyau en caoutchouc neuf, la destruction de sa vie.
Je dépose la boîte noire de ma mère dans celle plus vaste de mon grand-père, grise et pleine d’archives, pour faire de la place.
À peine un fait sans récit. On range, on plie, on se tait. Ma mère était une œuvre d’art minimal et dense. Mon grand-père, lorsqu’il éparpillait les œufs de Pâques dans le jardin, était fou de joie. Il leur ressemblait : trempé dans le vernis d’un sourire indirect.

Stataband, de Miléna platone

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